Comprendre le protestantisme

Comprendre le protestantisme

A l’heure où bien des protestants ne savent plus trop bien ce qui constitue leur identité, le petit livre de Geoffroy de Turckheim, « Comprendre le protestantisme », est une occasion de se rafraîchir la mémoire, d’appréhender la pensée et la culture protestantes et de distinguer un réformé d’un pentecôtiste
Utile à une époque où l’on met trop facilement tous les protestants dans le même panier en les assimilant aux fondamentalistes américains. Des causes de la Réforme jusqu’aux développements actuels du protestantisme évangélique, en passant les mouvements de Réveil et l’émergence d’un protestantisme libéral, le petit livre de Geoffroy de Turckheim propose une approche pédagogique claire et complète de la Réforme protestante qui, au 16ème siècle, a divisé l’Europe tout entière et dont sont issus les différents courants du protestantisme.

La Réforme est en fait l’aboutissement d’un long processus et qu’elle a d’abord été une réponse religieuse à la grande angoisse du moyen âge finissant. Différents mouvements de refondation religieuse ont perturbé la vie de l’Eglise avant même l’apparition du protestantisme. Dès le 12e siècle, Pierre Valdo, riche marchand lyonnais gagné à l’idéal de pauvreté, puis au 14e siècle John Wyclif, prêtre et professeur à Oxford, et Jan Hus à Prague, mettent en doute la crédibilité de l’Eglise romaine, estimant qu’elle agit davantage pour ses intérêts que pour l’annonce de l’Evangile, sa vocation première. Les trois (pré)réformateurs dénoncent les pouvoirs exorbitants des papes et partagent une même vision au sujet de la Bible, du rôle des laïcs et de la question du salut.

Mais le protestantisme est véritablement né avec Luther, promu, contre son gré, père spirituel des Eglises de la Réforme, quand il décide de dire tout haut ce que les gens pensent tout bas. Le 31 octobre 1517, il affiche 95 thèses à la porte de la chapelle du couvent de Wittenberg, où il est moine, pour dénoncer ce qu’il considère comme un véritable trafic : la vente des indulgences qui permettent de remettre une peine qui a été infligée à un fidèle à la suite d’une faute considérée comme un péché. Il estime que ces pratiques donnent aux fidèles une idée fausse des moyens de leur salut. A quoi sert en effet l’Evangile s’il suffit, pour assurer son salut, de mettre la main à son portefeuille ? Pour Luther, aux yeux de Dieu, l’homme est rendu juste par sa foi, uniquement par elle et indépendamment de ses œuvres, de sa conduite morale et de son attachement aux dogmes et aux rites de l’Eglise. « Sola Fide », par la foi seule, est l’un des grands principes fondateurs de la Réforme.Les grands principes protestants A la suite de Luther, Calvin et Zwingli, les réformés affirment la priorité de la lecture et de l’interprétation personnelles de la Bible, préconisent la liberté complète de la conscience contre toutes les formes d’autoritarisme, rejettent toute hiérarchie et toute infaillibilité dans l’Eglise, placent sur pied d’égalité pasteurs et laïcs autorisés à célébrer le culte et les sacrements ; ils prient Dieu et le Christ mais n’invoquent ni Marie ni les saints, et considèrent que l’amour fraternel est la réponse désintéressée à l’amour que Dieu porte à tout être.

Au 19e siècle, les mouvements dits de Réveil (revival) apportent un regain de vitalité à l’Eglise qu’ils estiment endormie par trop d’habitude et par manque de foi et de piété. Ils invitent les fidèles à entrer dans une démarche de conversion personnelle. En cela, ils annoncent les mouvements pentecôtistes. Ces derniers s’organisent d’une manière distincte des Eglises protestantes traditionnelles, au point d’entretenir avec elles des relations difficiles et parfois conflictuelles. Ces Eglises, en plein essor aujourd’hui, ont renoué avec la piété primitive, appris à s’exprimer avec la voix du cœur et de l’émotion et adoptent en général une vision millénariste qui proclame qu’une ère nouvelle est sur le point de commencer.

Par son graphisme original, mêlant encadrés, textes d’auteurs et courts paragraphes, ce précis est d’une lecture aisée pour le néophyte. Il lui permet de naviguer avec simplicité en terre protestante, multiculturelle et diverse, sans se perdre dans le jargon religieux. Une approche à saluer pour sa rigueur et sa simplicité.

Comprendre le protestantisme, Geoffroy de Turckheim, 216 pages, 2006, Editions Eyrolles Pratique.