Henri Künzler, l’ancienne voix des cultes radio, n’est plus

Henri Künzler, l’ancienne voix des cultes radio, n’est plus

Pendant dix-huit ans, le pasteur et journaliste genevois a dirigé le Service protestant de la Radio Suisse Romande (RSR) et a fait connaître le protestantisme romand à des dizaines de milliers de fidèles-auditeurs.

C’est lors d’une simple visite chez le physiothérapeute que l’homme d’Église et de radio s’est brusquement éteint, ce 28 septembre, à l’âge de 90 ans. Ce pasteur genevois avait consacré sa vie au ministère, d’abord en chaire puis en devenant journaliste ainsi que producteur des cultes radio, de 1978 à 1996. Il dirigea en outre le Service protestant de la Radio Suisse Romande (RSR) pendant plusieurs années. Pour de nombreux réformés de Suisse, il était devenu la voix de la Parole. Son successeur Michel Kocher, directeur de Médias-pro, qui présidera par ailleurs le culte d’à-Dieu ce mercredi à Genève, lui rend hommage.

Que représentait Henri Künzler pour les reformés romands? De quoi était-il la figure?

Comme d'autres figures protestantes de la radio, Philippe Zeissig et Daniel Grivel dans le canton de Vaud, Philippe Gilliéron à Genève, il représentait cette disposition de cœur et d'esprit d'être dans la société pour y apporter un regard bienveillant, décalé, empreint d'un sens du vivre ensemble qui prend ses racines dans l'Évangile. Il exprimait aussi la présence des Églises protestantes et catholique dans la société, dans un espace culturel fédérateur et convivial.

Il a dirigé pendant dix-huit le Service protestant romand de la radio. Quelles marques y a-t-il imprimées?

Henri Künzler a pris la direction du Service protestant de radio à un moment où les esprits de clocher, Radio Genève d'un côté, Radio Lausanne de l'autre, avaient vraiment perdu de l'importance, au profit d'une vision romande. Il a offert le profil d'un pasteur sans couleur et identité cantonale trop prononcée, il a surtout consolidé l'impulsion du virage vers le journalisme, que nous avons tous suivi et qui est maintenant dominant. Il a sans conteste renforcé les liens à l'interne de la Radio Romande travaillant, tant avec nos collègues catholiques qu'avec la rédaction Société, tenue alors par la flamboyante et féministe Marie-Claude Leburge. 

A vos yeux, était-il le représentant d'un monde qui n'est plus, ou qui existe encore?

Ce monde n'est plus, ou presque plus, sans l'ombre d'un doute. C'est celui d'une légitimité non questionnée de la place de la religion, de la foi et de l'expérience croyante dans l'espace médiatique. Aujourd'hui, tant la foi que l'expérience croyante, ne suffisent plus à faire sujet, à nouer débat, hors polémiques: la religion oui, mais dans un cadre qui est largement réducteur. C'est celui du «fait religieux» et de son décryptage. Henri Künzler, qui avait écrit son mémoire de licence sur «la présentation et la portée de l'anthropologie de Karl Barth» était le dépositaire d'une vraie lecture théologique, foisonnante, peu clivante de l'expérience croyante. Il nous a laissé, avec ses contemporains, le soin d'accueillir ce riche héritage et de le faire fructifier, autrement.