Les chercheurs préparent un toilettage du texte biblique

Les chercheurs préparent un toilettage du texte biblique

Publiée en 1982 et révisée une première fois en 1997, la Bible en français courant connaît une nouvelle révision. Ce texte mis à jour sera disponible dès 2018, année du bicentenaire de l’Alliance biblique française.

Par Joël Burri

Traduction très populaire de la Bible, la «Bible en français courant» est notamment la version privilégiée lors de la lecture à l’assemblée lors d’un culte. Cette version publiée en 1982 et révisée en 1997 fait actuellement l’objet d’une nouvelle révision. La nouvelle édition est attendue pour 2018, année du bicentenaire de l’Alliance biblique française.

Changements dans la langue française, nouvelles découvertes dans les textes servant de source aux traductions, remise en cause de choix de traduction; qu’est-ce qui motive une révision de ce texte? «Probablement un peu des trois», avance Innocent Himbaza, pasteur et maître d’enseignement et de recherche en Ancien Testament à l’Université de Fribourg. «Au niveau de la connaissance des sources, les recherches avancent toujours. Et aussi on comprend toujours mieux, certains textes: quelques fois, des travaux peuvent modifier la perception de certains mots. Les choix des traducteurs au niveau de la langue de destination peuvent aussi évoluer. Je pense qu’il y a aussi des sensibilités qui changent.»

Une révision de la Bible est une réévaluation du texte existant. Il ne s’agit pas de reprendre les textes hébraïques et grecs pour en faire de nouvelles traductions. «Il faut parfois faire des compromis. Par exemple dans le lévitique, j’ai observé que les mots “saint” et “sainteté” sont utilisés, mais par le verbe sanctifier. Il s’agit là probablement d’un choix que je vais accepter. Par contre, au verset 4 du chapitre 10, les fils de l’oncle d’Aaron sont qualifiés de frère. La traduction en français courant corrige logiquement en cousin. Mais dans la Bible, le terme de frère est chargé de sens. J’aurais donc plutôt tendance à garder celui-ci», explique le chercheur qui est chargé de la révision des livres de Malachie et du Lévitique.

Un autre exemple de révision qu’Innocent Himbaza juge nécessaire dans le texte en français courant concerne l’expression «s’asseoir sous sa vigne et son figuier.» «Cette notion apparaît quatre fois. Elle symbolise la stabilité, car celui qui est en guerre et est délogé ne profite pas du fruit de son travail. Cette expression est parfois traduite par cultiver. Pour moi, cela ajoute une idée qui n’apparaît pas dans le texte original.»

La Bible en français courant est un texte qui privilégie la langue de destination afin de rendre la lecture fluide. «Parfois, un verset qui court sur trois ou quatre lignes y est décomposé en deux ou trois phrases», explique le chercheur. La Bible Parole de Vie (traduction en français fondamental) propose une langue encore plus simple. Alors que les bibles d’étude telles que la Traduction œcuménique de la Bible (TOB), la Bible de Jérusalem ou la Nouvelle Bible Segond reprennent un peu la littéralité du texte. «En français, l’exemple type de la Bible de la traduction littérale poussée à son paroxysme est celui de la Bible Chouraqui», explique Innocent Himbaza. «Heureux les miséricordieux» y est traduit par «En marche, les matriciels!». «Pour comprendre cette phrase, il faut d’abord comprendre l’hébreu ou au moins son symbolisme», note le chercheur. «La miséricorde est exprimée en hébreu par son “siège” qui est la matrice, de la même manière que le cœur est le “siège” de la pensée», explique-t-il.

La révision de la Bible en français courant est un projet francophone et œcuménique, impliquant des chercheurs d’Afrique, d’Europe, d’Amérique du Nord, catholiques ou protestants. «Pour la Suisse romande, les trois universités de Fribourg, Genève et Lausanne participent, c’est important de se rendre compte que les recherches qui sont menées dans les facultés de théologie sont aussi au service des Eglises et des croyants», souligne Innocent Himbaza.

Des traductions pour tous les besoins

A l’exemple des béatitudes, certains textes symboliques peuvent varier sensiblement d’une traduction à l’autre. Ainsi pour Mathieu 5:7 (rédigé en grec par un auteur hébraïque):