Qu’est-ce qui freine l’égalité entre hommes et femmes?

Qu’est-ce qui freine l’égalité entre hommes et femmes?

Auteure d’une recherche sur les femmes de pouvoir, Torild Skard donnait une conférence lundi à Genève. Elle rappelle que les objectifs en matière d’égalité ne sont toujours pas mis en œuvre de manière satisfaisante.

Sur le papier, l’égalité entre hommes et femmes est garantie, mais dans la réalité, les femmes peinent à atteindre les 30% de représentations dans les parlements. L’ONU avait fixé la parité comme objectif pour l’an 2000, pourtant selon les chiffres d’ONU-femmes, en juin 2016, la proportion de femmes dans les parlements nationaux n’atteint que 22,8%. «Et les chiffres se réduisent encore pour les postes avec davantage de pouvoir», constate Torild Skard, ancienne secrétaire permanente du ministère des Affaires étrangères de Norvège. La proportion de femmes baisse en effet à environ 18% dans les cabinets ministériels et 7% parmi les hauts dirigeants.

Auteure de «Women of Power», une étude sur l’accession des femmes au pouvoir, Torild Skard, donnait lundi soir une conférence à Genève à l’invitation de l’Alliance internationale des femmes et du Conseil œcuménique des Eglises. «Quand on veut atteindre l’égalité, il y a des gagnants et des perdants», rappelle la psychologue de formation. «Les personnes qui sont au pouvoir utilisent donc des techniques de dominance pour maintenir leur position.» Elle liste: retenir l’information ou la rendre illisible, ridiculiser les besoins des minorités, user de la cooptation pour favoriser ses pairs, quoi qu’il arrive multiplier soit les reproches soit les humiliations, diviser pour régner et menacer.

Durant sa présentation Torild Skard a multiplié les exemples, tels que la disparition progressive de l’expression «égalité entre hommes et femmes» au profit d’«égalité de genre», qui contribue selon elle à rendre invisible ce combat. Elle a aussi rappelé les différences de vocabulaire utilisé: «on dira d’un homme qu’il est ambitieux, mais d’une femme qu’elle est agressive», rappelle Torild Skard. Un autre exemple a été donné par Esther Alder, conseillère administrative de la ville de Genève, dans son discours de bienvenue. «Nos séances avaient lieu le jour de congé de mes enfants. J’avais proposé de les déplacer afin que je puisse consacrer du temps à ma famille. Cela m’a été refusé et on m’a reproché ma proposition. Par contre, quand un collègue homme a été élu au Conseil national, il a paru parfaitement normal d’accepter la même demande afin qu’il puisse assumer son nouvel engagement politique.»

Parmi ses pistes de réflexion pour faire évoluer les choses, Torild Skard invite à s’engager davantage dans les partis. «Il faut se demander quel rôle jouent les partis politiques. Les fonctions dirigeantes y sont occupées par à peine 10% de femmes.» Par ailleurs, elle appelle à davantage de recherche. «Pourquoi cette question est-elle si peu étudiée? Je suis par exemple choquée qu’aucune étude ne soit faite sur les questions de genre parmi les populations migrantes. La migration est l’un des défis majeurs de notre époque!» Enfin, la chercheuse appelle à davantage d’engagements tant des femmes que des hommes: «il faut mettre en œuvre, mettre en œuvre, mettre en œuvre!»