Un nouvel institut de théologie pratique pour la Suisse romande

Un nouvel institut de théologie pratique pour la Suisse romande

Les 29 et 30 septembre prochains auront lieu les journées de lancement du nouvel Institut lémanique de théologie pratique. Protestinfo est allé à la rencontre des deux professeurs ordinaires de cet institut, commun aux facultés de théologie de Genève et de Lausanne. Interview.

Photo: Elisabeth Parmentier et Olivier Bauer ©Jean-Daniel Macchi/DR

Propos recueillis par Noriane Rapin

Pourquoi avoir créé un Institut lémanique de théologie pratique (ILTP)?

Olivier Bauer: C’est une vieille histoire si l’on veut bien, puisqu’elle a commencé il y a une trentaine d’année avec l’Institut romand de pastorale, à Lausanne. Celui-ci a disparu lorsque la faculté de Neuchâtel est devenue en elle-même une faculté de théologie pratique. L’idée était de recommencer à neuf dans une structure qui serait commune aux universités de Genève et Lausanne. C’est également la manière dont fonctionne administrativement l’université de Lausanne: la Faculté de théologie et de sciences des religions est divisée en plusieurs instituts.

Elisabeth Parmentier: L’objectif de cet institut est qu’il soit au service de la recherche en théologie pratique. Il a la double tâche de faire de la recherche académique et d’être au service des questions contemporaines, dans l’Eglise et dans la société. Par exemple, l’institut a des partenaires au niveau romand, que ce soit l’Office protestant de formation, ou les différents lieux de réflexion autour de la catéchèse. On peut ainsi leur proposer une analyse de leurs pratiques et les inviter à prendre du recul. Aussi, l’idée d’un institut commun est de fédérer les énergies et les potentialités de recherche en Suisse romande. C’est quelque chose qui est très important pour moi.

La théologie pratique est-elle encore pertinente?

OB: Elle est encore pertinente, car tant qu’il y a des Eglises protestantes, il est utile d’étudier leur fonctionnement et de savoir si elles sont fidèles à leur référent, que ce soit la Bible ou la théologie du XXe siècle. L’autre grande question est de savoir si elles sont encore efficaces dans la société actuelle. En bref, tant qu’il y a des pratiques visant à transmettre l’Evangile, la théologie pratique doit pouvoir les évaluer, les critiquer et éventuellement les améliorer.

EP: La théologie pratique est aussi pertinente parce qu’elle se trouve à l’intersection de la théologie et des enjeux contemporains. Elle est aux prises avec les questions existentielles du monde actuel. Par exemple, au lancement de l’ILTP, nous allons traiter de la bénédiction. On observe que c’est un grand besoin aujourd’hui: on bénit le tunnel du Gottard, on demande la bénédiction de son mariage… La théologie pratique traite également des questions sociales, par exemple l’immigration ou le dialogue œcuménique et interreligieux. Mais la théologie pratique est aussi en lien avec la société par les méthodes qu’elle utilise: elle part du terrain pour analyser ce qui se vit avec, entre autres, les méthodes des sciences humaines.

Quelles sont vos perspectives de recherches?

EP: Actuellement, le thème de la bénédiction m’intéresse. Je veux comprendre le besoin des personnes qui la demandent et sa signification. Je prépare également un projet sur les Eglises issues de l’immigration. Les sociologues s’y sont intéressés, mais pas encore les théologiens, or j’aimerais connaître la vision d’Eglise au sein de ces communautés. Je veux également développer des méthodes pour le dialogue interreligieux. Je viens de l’œcuménisme, où des méthodes existent, mais une telle recherche n’a jamais été entreprise dans le domaine de l’interreligieux.

OB: Je m’intéresse à la place des différents sens dans la transmission de l’Evangile. On pense que la foi est transmise par la parole, mais on constate que ce n’est pas le cas et que cela passe souvent par des expériences très sensorielles. Je suis également intéressé par tout ce qui touche à l’éducation chrétienne. Plus largement, je m’intéresse aux relations entre alimentation et spiritualité, et entre sport et religion. J’ai également été nommé pour traiter de l’accompagnement spirituel: dans ce domaine, j’aimerais réfléchir à ce qui différencie accompagnement spirituel et accompagnement pastoral ou diaconal.

Parlez-nous de vous. Pourquoi être venus poursuivre votre carrière en Suisse romande?

EP: D’origine alsacienne, j’ai enseigné pendant 19 ans la théologie pratique à la faculté de théologie protestante de l’université de Strasbourg. Lorsque j’ai été appelée pour occuper le poste qui allait être créé à Genève, je me suis dit que cette opportunité me permettrait de renouveler mes perspectives, et d’être en contact avec le contexte réformé que je connais moins, moi qui suis luthérienne.

OB: Je suis né en Suisse, à Neuchâtel, et j’ai vécu toute ma vie professionnelle de théologien pratique moitié à l’université, moitié dans différentes Eglises autour du monde. Après 13 ans en Amérique du Nord, notamment à l’Université de Montréal où j’ai enseigné, j’avais envie de revenir en Suisse. Aussi, le contexte large du protestantisme réformé romand me semblait intéressant, tout comme la possibilité de partenariat avec les Eglises.