Comment concilier différentes religions lors d’un service funèbre?

Comment concilier différentes religions lors d’un service funèbre?

La moitié des services funéraires du Centre de Montoie sont religieux. Chrétienne, musulmane ou bouddhiste, la religion et les volontés du défunt sont respectées. Mais qu’en est-il lorsque la personne décédée se sent proche de plusieurs communautés?

«Les familles sont très respectueuses de la foi de la personne qui s’en va et s’organisent pour mettre en place des cérémonies interreligieuses si c’est la volonté du défunt», observe Edmond Pittet, le directeur des Pompes funèbres générales à Lausanne, lors d’une journée de formation sur le thème «Célébrations du mariage et des funérailles dans un contexte interreligieux», mercredi 7 mai, à la fondation Crêt-Bérard, à Puidoux.

La moitié des cérémonies funèbres du Centre du Montoie sont religieuses. Elles concernent des personnes des communautés réformée, catholique, musulmane, bouddhiste et israélite. Mais parfois le défunt «appartient» à deux communautés. Par exemple, un homme bouddhiste qui épouse un femme réformée et souhaite pour son enterrement un service qui allie les deux religions. Selon le directeur des Pompes funèbres générales, les enterrements interreligieux ne suscitent pas de tension car «les familles veulent honorer les vœux de leur proche qui s’en est allé et mettent tout en œuvre pour le faire».

Edmond Pittet se souvient d’un couple dont la femme était chrétienne et le mari musulman, il est décédé en premier et a été enterré selon les rites de sa religion. Dix ans plus tard, la femme est morte, s’est faite incinérée et a reçu, selon sa volonté, un service funèbre chrétien. Néanmoins, elle souhaitait reposer auprès de son mari mais l’incinération ne se pratique dans l’Islam. Ainsi, les cendres de l’épouse ont été déposées au jardin du souvenir et l’urne vide dans la tombe du mari.

L’Islam ne conçoit pas les enterrements interreligieux

Pourtant, selon l’imam Mostafa Brahami les rites funéraires musulmans ne peuvent pas être «mélangés» avec ceux d’une autre religion. «Le rite funéraire est un rite d’adoration qui est définit par les textes», explique l’imam. Il se déroule en quatre étapes: le lavage du corps, l’enveloppement dans un linceul, la prière et la mise en terre. «Le deux premières étapes ne sont pas essentielles si elles ne sont pas praticables, par contre la prière et l’enterrement sont fondamentaux». En Suisse, les musulmans décédés rencontrent plusieurs problèmes: l’orientation du corps vers La Mecque, l’enterrement parmi les leurs et le fait que les concessions ont un temps limité en Suisse.

Si les enterrements interreligieux sont peut concevables dans l’Islam, ils sont fréquents entre protestants et catholiques, notamment dans le canton de Fribourg. Mais, il est rare qu’un pasteur et un prêtre soient présents conjointement. «Il m’arrive d’être le seul protestant avec le défunt et tout le reste de l’assemblée est catholique», explique le pasteur Martin Burkhard, à Fribourg. «Il faudrait pouvoir s’exprimer dans un mode conforme aux deux religions, pour réussir à consoler toute l’assemblée».

Alors que la moitié des services sont religieux, les autres sont laïcs. «Les services laïcs sont beaucoup plus compliqués, pour nous, au niveau de l’organisation car il n’y a pas de «responsable» de cérémonie», explique Edmond Pittet, le directeur des Pompes funèbres générales. Qui introduit le service sans un prêtre ou un pasteur? Ce travail revient aux employés des pompes funèbres. «Les familles ont des attentes fortes et cela repose sur nos épaules».

Grande baisse des funérailles oecuméniques

«Il y a 25 ans, nous avions beaucoup plus de demandes pour des services œcuméniques avec par exemple un pasteur et un prêtre. Ce n’est quasiment plus le cas actuellement», constate le directeur des Pompes funèbres générales. Selon lui, une des causes serait la sécularisation des enfants des défunts. «Que ce soit un prêtre ou un pasteur, cela n’a pas vraiment d’importance pour eux». De plus, une majorité des personnes âgées décèdent en EMS et ont un contact avec l’aumônier de l’établissement. «L’aumônier est souvent la dernière personne avec qui le défunt a pu se confier et souvent la famille souhaite que ce soit lui qui officie pendant le service funèbre», précise Edmond Pittet.Les mariages interreligieux

«Environ 50% des mariages en Europe sont interculturels et une grande partie sont interreligieux», signale le pasteur Martin Burkhard qui s’intéresse aux dialogues interreligieux depuis plus de vingt ans. Pour ce pasteur, la perception de l’altérité au sein du couple est une donnée fondamentale. Et si les familles se rapprochent lors des enterrements, les mariages interreligieux suscitent parfois des tensions. Il s’agit de trouver un moyen d’accueillir les couples mixtes au sein des deux communautés religieuses.

Alors que l’Islam ne conçoit pas les enterrements interreligieux ce n’est pas le cas pour les mariages. «Le mariage n’est pas un rite d’adoration mais un contrat civil, contrairement au service funèbre, il ne fait pas partie du domaine du rituel», explique Mostafa Brahami. Pourtant, selon cet imam, les mariages co-célébrés sont rares.