Drones: Permis de tuer?

Drones: Permis de tuer?

Washington - Lausanne - Les États-Unis doivent rendre des comptes pour les morts au Pakistan, selon Amnesty International. L'organisation affirme, preuve à l'appui, que les États-Unis ont illégalement tué des personnes au Pakistan lors d'attaques de drones. Certaines de ces attaques pourraient même être considérées comme des crimes de guerre, souligne l'organisation dans un rapport rendu public à Washington.

Le rapport, intitulé Will I be next? US drone strikes in Pakistan, fournit des informations sur les homicides perpétrés récemment dans les zones tribales du nord-ouest du Pakistan et sur l'absence quasi totale de transparence autour du programme de drones américain. «Le secret qui entoure ce programme fournit au gouvernement des États-Unis un permis de tuer qui échappe aux tribunaux et est étranger aux normes essentielles du droit international», a déclaré Mustafa Qadri, chercheur d'Amnesty International sur le Pakistan.

Ce document a été rendu public lors d'une conférence de presse organisée conjointement avec Human Rights Watch, qui lance son propre rapport sur les attaques aériennes au Yémen, notamment à l'aide de drones. Amnesty International a passé en revue la totalité des 45 attaques de drones qui, à sa connaissance, ont frappé le nord-ouest du Pakistan, entre janvier 2012 et août 2013.

Cette région a été la cible de plus d'opérations que toute autre région du pays. L'organisation a étudié minutieusement sur le terrain neuf de ces attaques et rassemblé des informations sur les morts. Les attaques soulèvent des questions graves sur les violations du droit international qui pourraient s'apparenter à des crimes de guerre ou à des exécutions extrajudiciaires.

Alors que les sources officielles affirment que les personnes tuées étaient des «terroristes», Amnesty International est arrivée à la conclusion, au terme de ses recherches, qu'elles n'étaient pas impliquées dans les combats et ne représentaient aucun danger pour autrui. «Nous ne trouvons rien qui justifie ces homicides», a poursuivi Qadri. L'organsation reconnaît toutefois qu'il existe des menaces réelles contre les États-Unis et ses alliés dans la région, et dans certaines circonstances les frappes de drones sont peut-être légales.

Passivité de l'État pakistanais

Le rapport fait en outre état de la passivité de l'État pakistanais qui omet de protéger les droits humains des habitants du Waziristan-Nord. Des personnes ont ainsi été tuées, blessées ou déplacées par les bombardements de l'armée, l'appareil judiciaire est inexistant et l'assistance médicale insuffisante. Le bilan des autorités pakistanaises laisse beaucoup à désirer dès lors qu'il s'agit de traduire en justice Al Qaïda, les talibans ou d'autres auteurs d'atteintes aux droits humains et de les juger au cours de procès équitables qui excluent le recours à la peine de mort. (comm/tb)