Le Catéchisme de Heidelberg s’offre une réédition pour ses 450 ans

Le Catéchisme de Heidelberg s’offre une réédition pour ses 450 ans

Qui connaît encore le Catéchisme de Heidelberg? Le théologien romand Pierre-Olivier Léchot profite des 450 ans de cette œuvre pour revenir aux sources. Réponse à l’inculture religieuse, support pour apprendre à lire et moyen de résistance, le Catéchisme de Heidelberg est un texte clé de la Réforme protestante.

«Je me suis aperçu qu’on n’avait pas vraiment conscience de l’impact de ce texte chez les francophones», explique Pierre-Olivier Léchot, titulaire de la chaire d’histoire du christianisme à l’époque moderne, à la Faculté de théologie protestante de Paris. Publié en allemand pour la première fois en 1563, le Catéchisme de Heidelberg a été initié par le prince Frédéric III, dans la principauté de Palatinat, une région de la future Allemagne. Traduit en français en 1607, il a été utilisé pour l’enseignement du catéchisme jusqu’au milieu du 20ème siècle, dans le monde protestant francophone.

Cette œuvre est rédigée sous la forme interrogative. Elle contient 129 questions et réponses réparties en 52 sections appelées «dimanche». «L’idée était de faire le tour de ce catéchisme en une année. Le dimanche matin avait lieu le culte et le dimanche après-midi le catéchisme pour tous», explique Pierre-Olivier Léchot. Les catéchumènes devaient l’apprendre par cœur. «Ce texte est une porte d’entrée pour pouvoir ensuite lire la Bible tout seul», ajoute le théologien.

Ce catéchisme est constitué de trois parties ainsi que d’une introduction. L’introduction pose la question de la consolation: «Quelle est ton unique consolation dans la vie et dans la mort?». Chaque réponse est basée sur plusieurs références bibliques. Dans les trois parties, le catéchisme aborde successivement la question du péché, intitulée «De la misère de l’homme», puis de la délivrance du péché, «De la délivrance de l’homme» et finalement de la gratitude envers Dieu pour cette délivrance, «De la reconnaissance».

Avant la Réforme

Avant la Réforme, il n’y avait pas de catéchisme. «Ils ont été créés après la Réforme pour surmonter essentiellement l’inculture religieuse galopante», explique le théologien. «Au Moyen-Age, c’est la religion du rite. Avec la Réforme, on passe à une religion de l’écoute et de la lecture». Ainsi, le catéchisme a permis à la population d’apprendre à lire et aussi d’apprendre d’autres langues grâce aux versions bilingues.

Traduit pour la première fois en français en 1607 à Genève, «c’est dans le pays de Vaud qu’il connaît son destin le plus remarquable», peut-on lire dans l’introduction. «Les pasteurs du canton de Vaud, à cette époque, ont trouvé que c’était le catéchisme qui correspondait le mieux à leur foi». A cette époque, il y avait aussi, entre autres, les catéchismes de Luther et de Calvin, l’un plus anthropologique, l’autre plus théologique. «Le catéchisme de Heidelberg est un peu un «mélange des deux», explique le théologien.

«Ce catéchisme s’adresse aux catéchumènes. Il les interpelle, leur demande en quoi cela les concerne. Il cherche à ébranler le lecteur, c’est ce qui a fait son succès». Il est rapidement devenu une confession de foi normative. Quand les Huguenots sont arrivés dans la partie francophone de la Suisse, à la fin du 17ème siècle, ils ont eu l’interdiction de le contredire. Bien que le catéchisme de Calvin ait eu plus d’impact en France que celui de Heidelberg, ce dernier a commencé à susciter de l’intérêt au moment-même où il en perdait en Suisse.

Déclin dès 1830

A partir de 1830, il a commencé à être moins utilisé dans le canton de Vaud. Mais, il a quand même été enseigné, dans le canton de Neuchâtel, jusqu’en 1950. «Depuis 50 ans, on n’utilise plus un catéchisme doctrinal, on est davantage tourné vers un catéchisme de nature existentielle, qui concerne le croyant», explique Pierre-Olivier Léchot.

Pourtant, au 20ème siècle, le Catéchisme de Heidelberg a été une source d’inspiration pour la résistance protestante, face au nazisme, par exemple. «La question posée dans l’introduction «quelle est ton unique consolation?» est tout a fait pertinente. L’idée d’appartenance à Dieu est un moyen d’opposition à toutes les formes de totalitarisme».

«Cette réédition n’est pas destinée à être enseignée aux catéchumènes, elle se destine plutôt à des personnes qui ont fait un cheminement de foi et qui y voient un lieu de réflexion». Le Catéchisme de Heidelberg est par contre encore utilisé dans certains milieux évangéliques et orthodoxes de Suisse. En Allemagne et en Hollande, où il a eu un impact sur une plus longue durée, il a été réédité en versions modernisées et fait partie des textes de références.

Référence

Le Catéchisme de Heidelberg, au cœur de l’identité réformée. Introduction de Pierre-Olivier Léchot. Labor et Fides, Genève, 2013. 113 p.