Le Conseil évangélique de Donald Trump accusé d'opacité

Le Conseil évangélique de Donald Trump accusé d'opacité

Les chiens de garde de la neutralité religieuse des États-Unis déclarent illégales les rencontres entre l’administration Trump et le groupe informel de conseillers évangéliques.

Une organisation qui s’est donné pour mission de contrôler les relations entre Église et État exige qu’on mette fin aux rencontres entre l’administration Trump et un groupe informel de conseillers évangéliques qui s’avèrent être les supporters les plus ardents du président. Les Américains unis pour la séparation de l’Église et de l’État affirment que le groupe est en violation avec l’Acte fédéral du Comité de conseil (FACA), une loi de 1972 qui prône la transparence et définit les normes procédurales pour les comités qui se forment pour rencontrer l'exécutif. L’organe de contrôle veut mettre fin aux rencontres de ce groupe et à leurs activités de conseil «sauf si et jusqu’à ce que» celui-ci se conforme à la loi.

«Il est évident que le Groupe de conseil évangélique du président travaille de manière intense avec l’administration Trump derrière des portes closes. Le public ne peut pas comprendre le pourquoi et le comment de certaines décisions», écrit Alex J. Luchenitser, le directeur juridique adjoint d’Américains unis pour la séparation de l’Église et de l’État, dans une lettre datée du 30 août et adressée au conseiller de la Maison-Blanche Don McGahn, ainsi qu’à d’autres représentants de l’administration. Elle a aussi été envoyée à Johnnie Moore, le porte-parole non officiel du groupe évangélique.

Cette dénonciation intervient la semaine même où le président Trump a rencontré une centaine d’évangéliques pour un repas dans la salle à manger d’État à la Maison-Blanche. Le président les a accueillis le lundi 27 août en disant: «Voici des amis qui me sont particulièrement chers. Des pasteurs et responsables évangéliques de tout le pays.» Tout en citant les noms des personnalités présentes, y compris la pasteure de la mégachurch Paula White, l’évangéliste Franklin Graham et Jerry Falwell Jr, président de l’Université Liberty, Trump a ajouté: «je vous connais, je vous observe, je vous vois. Ce sont vos paroles que je veux entendre.»

Au menu: discussion sur l'avortement, les droits des LGBT et la liberté religieuse

Les évangéliques qui ont rencontré l’administration Trump ont confirmé à Religion News Service (RNS) qu’ils ont discuté de diverses questions politiques, telles que l’avortement, les droits pour les personnes trans ou la liberté de religion dans le monde.

«L’administration continue à consulter des centaines de dirigeants religieux sur toute une série de questions qui ont un impact direct sur leurs communautés», confirme Hogan Gidley, secrétaire de presse adjoint de la Maison-Blanche interrogé par RNS. «La Maison-Blanche n’a pas de groupe de conseil évangélique; au contraire, le président a signé l’acte exécutif ratifiant l’Initiative “foi et opportunité” qui permet à toutes les communautés religieuses une meilleure collaboration avec les autorités», précise-t-il.

Le président Trump a accordé aux responsables d’une minorité d’une seule religion une influence sans précédent sur des décisions législatives qui nous affectent tous
Rachel Laser

Rachel Laser, présidente des Américains unis, réclame une plus grande transparence concernant les conseillers. «Le président Trump a accordé aux responsables d’une minorité d’une seule religion une influence sans précédent sur des décisions législatives qui nous affectent tous», affirme-t-elle. «Les Américains ont le droit de le savoir — et d’avoir un gouvernement qui œuvre pour tous, pas seulement pour quelques-uns

«Il n’y a jamais eu de conseil religieux»

Dans sa missive, Alex J. Luchenitser écrit que les activités du groupe de conseil «entrent tout à fait dans les activités soumises au FACA.» Mais interrogé par RNS, Johnnie Moore réfute que le moindre pouvoir soit accordé au groupe. «Il n’y a jamais eu de conseil religieux ou évangélique à la Maison-Blanche et à ma connaissance, il n’y a aucun projet d’en créer un», rétorque-t-il. «Il n’est pas possible d’abolir quelque chose qui n’existe pas légalement!»

Pour le porte-parole officieux du groupe évangélique, la confusion a été causée par les médias. qui ont «décidé innocemment de reprendre dans les reportages sur la Maison-Blanche, le même vocabulaire que celui utilisé durant la campagne électorale pour désigner le groupe de soutiens évangéliques de Donald Trump. Un groupe qui depuis a été dissout» Pour Johnnie Moore, la plainte des Américains unis permet avant tout de «soutenir une campagne de récolte de fonds» de l’organisation militante.

Le nom de «Conseil religieux» a déjà été débattu précédemment. Certains de ses membres considèrent que ce n’est pas une description appropriée. Robert Jeffress, pasteur d’une mégachurch de Dallas se soucie que cela puisse avoir des implications légales, comme il l’a expliqué à RNS.

En juillet 2017, interrogée à propos d’une réunion durant laquelle des leaders religieux avaient prié pour Donald Trump et dont des photos avaient été publiées sur les réseaux sociaux, la chargée de communication Sarah Sanders a défendu la prière en expliquant: «Il s’agit du Comité de conseil religieux de Donald Trump. Ils se retrouvent de temps en temps pour discuter de questions importantes pour cette communauté.»

Melissa Rogers, ancienne directrice sous le président Obama pour l’Office de la Maison-Blanche pour les partenariats religieux et communautaires, a précisé à RNS que les conseils religieux sous l’administration Obama ont publié des rapports publics, tenu des rencontres publiques et étaient soumis à la loi de 1972. À la suite du dîner de fin août, elle a tweeté: «encore une fois, la Maison-Blanche de Trump semble favoriser les évangéliques (et surtout une sorte particulière d’évangéliques) par rapport à d’autres, tout en clamant la promotion de la liberté religieuse.»

Les Américains unis ont aussi invoqué la Loi d’accès à l’information auprès de dix agences fédérales pour demander des informations sur les réunions avec les conseillers évangéliques. Le groupe cherche également à découvrir la source du financement de ce dîner. Rob Boston, porte-parole des Américains unis, a précisé que son groupe de représentation espère recevoir une réponse à leur demande, même s’ils ne s’attendent pas à en avoir une. «Le gouvernement fédéral se doit de répondre à nos demandes invoquant la Loi d’accès à l’information», conclut-il.


Adelle M. Banks, Washington, collaboration Jack Jenkins, RNS/Protestinter